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  • Comprendre l'Utopie : quelle(s) utopie(s) ?
    Georges Bertin (sous la direction de)

    M@gm@ vol.10 n.3 Septembre-Décembre 2012

    L’UTOPIE COMME L’ESQUISSE D’UN AVENIR MEILLEUR


    Hervé Ondoua

    herveondoua@yahoo.fr
    Professeur de lycée et attaché de recherche à l' Ecole Normale Supérieure de Yaoundé; Doctorant à l'université de Yaoundé.

    Le postmodernisme se donne explicitement comme une philosophie de la mondialisation. En occident, Jacques Derrida, par sa déconstruction, est l’un des penseurs qui anime le débat postmoderne en considérant que notre ère manque la fin de rationalité, du progrès et de la recherche d’un sens. La déconstruction se définit comme l’ensemble des techniques et stratégies  utilisées par Derrida  pour démonter, fissurer et déplacer toute  logique universelle. Par le mécanisme de la différance, l’homme  sort de tout cadre originaire (grands  ensembles, méta récits), seul demeure la trace. L’homme pris dans la trace  marque son refus de solidarité avec tout centre, tout principe, toute origine, etc. Cette idée est radicalisée par le légiste, personnage emblématique dans l’Utopie de Thomas More.  En effet, le légiste fait l’éloge de la justice sévère anglaise. Partant de la théorie socio-biologiste selon laquelle les comportements sociaux sont génétiques, le légiste dans l’Utopie de More soutient qu’il faut une justice sévère, inflexible, rigide pour nettoyer la cité de ces maux. Dans ce sens, il faut condamner autant d’individus à la potence, car les maux sociaux sont naturels et innées.  C’est contre cette approche néolibérale que s’insurge Thomas More. Tout comme les mouvements de gauches, l’Utopie de More explique les maux sociaux par les injustices sociales, la démission de la société, et surtout le manque de l’éducation. Du coup, avec l’Utopie, il s’agit de relativiser le monde dans lequel nous vivons : un autre monde est possible que celui dans lequel nous vivons. Partant delà, l’utopie notamment celle de Francis Bacon ou Thomas More, n’est-elle pas un genre littéraire altermondialiste ? Si la logique néolibérale impose son diktat et pose le principe selon lequel il n’y a pas d’alternative autre que ce que nous offre le capitalisme, ne faut-il pas voir dans l’Utopie, un genre littéraire qui voudrait rétablir l’égalité entre les hommes ?

    1. L'objectif de l'Utopie de More

    Le regard  critique  fait partie de notre cosmos. Cette critique a pour dessein d’établir un  monde vers la perfection. C’est dans ce sens que s’inscrit que l’utopie de More. L’utopie n’est pas rêverie, mais une prise de conscience ou les  hommes vivraient en  harmonie.  Les utopies se construisent comme un laboratoire critique de l’organisation du monde. C’est ce qui  fait  dire à Oscar Wilde dans L’âme de l’homme qu’« une carte du monde qui ne comporte pas l’Utopie ne vaut même qu’on y jette un coup d’œil, car elle néglige le seul pays où aborde toujours l’humanité. Et quand elle y aborde, elle regarde autour d’elle, aperçoit une meilleure contrée et fait alors voile. Le progrès est la réalisation des utopies. » L’utopie est donc la capacité à transformer le monde. Elle dessine de nouvelles formes pour des nouvelles pratiques. Bien plus elle, offre des visions qui nous permettrait d’organiser, d’orienter nos espaces pour qu’ils soient plus vivables. C’est dans ce cadre que s’inscrit  l’Utopie de  More. En  effet,  L’utopie de  More se présente comme un livre de sagesse, un « véritable livre d’or  » [1]. Ce livre se présente comme une critique « des pratiques judiciaires utilisées en Europe au début du xvi e siècle  » [2]. Cette critique s’attaque  « sur les soldats mercenaires soucieux de leur argent avant que de défendre le pays  » [3]. Elle ironise sur « les trésors royaux ou l’abâtardissement, sur la politique conquérante qui mène aux désastres et aux ruines…  » [4]

    C’est pourquoi en se présentant comme la remise en  question  du mal radical qui pervertit la société, l’utopie se « prend une dimension quasiment ontologique  » [5] D’après l’auteur, ce mal se résume en des « ferments individualistes en lesquels l’amour-propre dégénère en égoïsme  » [6]. Leur origine découle « d’un pouvoir politique autocratique, le délire de la propriété individuelle d’où sont nées les disparités sociales et économiques du capitalisme  » [7]. Ce capitalisme a pour toile de  fond, les  ambitions politiques des riches de sécréter les injustices de tous ordres. C’est la même logique qui anime le postmodernisme. C’est dans cette perspective que le postmodernisme coïncide avec la logique néolibérale du marché. En transformant les hommes dans un « eternel présent », en faisant d’eux des êtres mobiles, fluides, flexibles, sans identités, le postmodernisme ne fait que servir l’intérêt du capitalisme impérial.  Le postmodernisme  apparaît comme un facteur de déclin des « méta récits ». Ce sont des facteurs  d’élargissement, de  l’individualisme, du décentrement ; ceci en diversifiant  les possibilités de choix et en liquéfiant les repères. La postmodernité  agence « une culture personnalisée ou sur mesure permettant à l’atome social de s’émanciper du balisage disciplinaire révolutionnaire »[8]. Contre cette politique, l’objectif de More est de montrer que dès  sa cellule originelle, la société civile est « une  vaste famille, il lui assigne comme règle dans une mutuelle affection, la cohésion et la solidarité [9] . Par conséquent, « les voies en leur généralité, doivent être, pour tous, le rempart de l’égoïsme  » [10]. On peut donc conclure que l’humanisme réformiste de More « a pour règle première de répondre aux requêtes ontologiques de l’humanitas  »  [11].
         
    2 Le lieu de préfiguration du capitalisme


    a L’origine du vol

    L’Angleterre que connaît More traverse une crise  socio-politique.  Ainsi par  exemple, les soldats qui n’ont plus à combattre ne trouvent pas de travail dans  les  campagnes [12], les  débuts de l’économie capitalistes  transforment non seulement  la vie des  villes  mais  aussi la vie rurale, car elle oriente les  activités vers  l’élevage ovin et  délaisse l’agriculture. En  outre, les enclosures, l’appropriation privée se multiplient. Par ailleurs, la grande propriété terrienne provoque la dépossession des petits paysans qui se retrouvent au chômage. On  les  retrouve  « errant dans les campagnes, sans travail, sans argent et affamés  »  [13]. Comme conséquence, il en résulte  une « misère intense ; campagne du vagabondage  »  [14]. Cette  misère engendre « l’inflation du vol et du pillage. » C’est pourquoi « la justice pénale se montre impitoyable ; elle punit de mort le voleur et même le vagabond  » [15]. Pour s’en convaincre, suivons le dialogue  entre  Raphaël,   le légiste  et  le prêtre.

    Le légiste, ferré sur le droit anglais, semble apprécier l’inflexible de cette justice. Contre les voleurs, disait-il, on pouvait « en voir ici et là vingt pendus ensemble à la même croix  »  [16]. Fustigeant cette  justice, Raphaël estime que  cette punition va «  au-delà du droit sans pour cela servir l’intérêt public  » [17]. Bien plus, il est trop cruel pour punir le vol et impuissant à l’empêcher. En effet « un vol simple n’est pas un crime si grand qu’on doive le payer de la vie  » [18]. La stupidité de ce châtiment s’explique par le  fait qu’ « aucune peine ne réussira à l’empêcher de voler ceux qui n’ont aucun autre moyen de se procurer de quoi vivre  » [19]. A partir de là,  il résulte que le  vol découle de la misère, laquelle d’ailleurs découle du chômage.  Au lieu  de comprendre et de trouver les causes qui poussent les individus à voler, on se contente  plutôt  de les punir. Raphaël compare l’attitude de ce peuple à celui d’un maître qui s’occupe à battre ses  élèves plutôt qu’à les  instruire. Du coup «  on décrète contre le voleur des peines dures et terribles alors qu’on ferait mieux de lui chercher des moyens de vivre, afin que personne ne soit dans la cruelle nécessité de voler d’abord et ensuite d’être pendu  » [20].

    Pour le  légiste,  cet argument n’est pas valide. On ne  saurait  expliquer ou dire que le vol résulte de la misère. Car « on y a suffisamment pourvu. Il y a des industries, il y a l’agriculture; ils pourraient y gagner leur vie, s’ils ne préféraient pas être malhonnêtes  » [21]. A en croire, le légiste, le vol résulterait de la malhonnête des individus, car il y a  assez d’emplois.

    b Le fondement de l’accumulation primitive

    S’opposant à cette thèse, Raphaël pense que le fond du problème est l’accumulation primitive. Tout d’abord, il existe des soldats qui reviennent de guerres en étant mutilés. Ayant donné leurs membres à l’Etat ou au roi, ils sont abandonnés.  Non seulement leur faiblesse ne leur permet plus d’exercer leur métier, mais aussi leur  age ne leur permet pas d’en apprendre un  autre. En outre, l’appauvrissement des  individus  par les  nobles  pousse les hommes à voler. Ces nobles « passent leur vie à ne rien faire  » [22]. Ils sont des frelons nourris du  labeur d’autrui, ces  nobles pour  accroître leurs revenus, « tondent jusqu’au vif les métayers de leurs terres  » [23]. Ne trouvant plus de mains-d’œuvre, ces nobles furent obligés soit de vendre des terres, soit d’en louer à des taux  excessifs, soit de transformer en pâtures à moutons. Bien plus, «ils traînent de plus avec eux des escortes de fainéants qui n’ont appris aucun métier capable de leur donner leur pain  » [24]. Imaginons ces  gens si leur  maître  vient à mourir ou qu’eux  mêmes tombent malades. Ils « sont aussitôt mis à la porte  » [25]. Car, « on accepte plus volontiers de nourris des désœuvrés que les malades  » [26]. A cette raison, il faut ajouter l’idée selon laquelle « l’héritier d’un domaine n’est pas tout de suite en état d’entretenir la maisonnée du défunt  » [27]. Par conséquent, «  les pauvres diables sont vigoureusement affamés, à moins qu’ils ne rapinent vigoureusement  » [28]. Ils n’ont que d’autre choix que de voler. D’ailleurs « que pourraient-ils faire d’autre ?  » [29]. Plus grave, « à force de rouler ça  et là ils ont peu à peu usé leurs vêtements et leur santé  » [30]. ils sont « dégradés par la maladie et couverts de haillons  » [31]. Ils sont rejetés par toutes les classes sociales. Cet état conduit au fait que d’une part « les nobles ne consentent plus à leur ouvrir la porte  » [32] et d’autres part, « les paysans ne s’y risquent pas, sachant fort bien que celui qui a été élevé mollement dans le luxe et l’abondance  » [33], qui de surcroît « ne sait manier que le sabre et le  bouclier  » [34], et regardent les autres du haut de ses grands airs et méprisant tout le monde » [35], « ne sera  jamais de  servir fidèlement un pauvre homme », « pour un maigre salaire et une pitance chichement mesurée  » [36].

    Contre cette approche,  le légiste soutien qu’il va de l’intérêt à tenir cette espèce au chaud. Car « qu’une guerre vienne à éclater, c’est dans ces gens là que résident la force et la résistance de l’armée, car ils sont capables de bien plus de courage et d’héroïsme que les ouvriers et les paysans  » [37]. Autrement dit, pour le légiste, ses catégories d’hommes doivent être employés au sein de l’armée. Pour Raphaël, dans ce  cas, il « vaudrait soutenir que pour l’amour de la guerre nous devons tenir au chaud les voleurs… » car, « si les brigands ne sont pas les moins courageux des soldats, les soldats ne sont pas les moins hardis des voleurs, tant les deux métiers sont joliments apparentés  » [38]. Aussi pour Raphaël un « Etat n’a jamais aucun intérêt à nourrir en vue d’une guerre  » [39], « une foule immense de gens de cette espèce, qui mettent la paix en danger.   » [40].

    L’autre raison capitale qui oblige les gens à voler découle de l’expropriation. C’est le problème du mouton, et le problème du textile. Pour développer ces industries, il faut le pâturage. On va donc exproprier les  terres  des  paysans. N’ayant  plus  de  terre, ils n’ont que leur force de  travail ou voler. En fait  ces  nobles sont si cyniques que « non content de vivre largement et paresseusement des revenus et rentrées annuelles que la terre  » [41], ils « ne laissent plus aucune place à la culture, démolissent les fermes, détruisent les villages, clôturant toute la terre en pâturages fermés, ne laissant subsister que l’église, de laquelle ils feront une établie pour leurs moutons  » [42]. De surcroît, ces nobles « transforment en désert des lieux occupés jusqu’alors par des habitations et des cultures  » [43]. Autrement dit, les cultures ont cédé le pas  aux pâturages. C’est ce qui explique le fort chômage d’ouvriers agricoles et empêchent les  simples et petits gens de nourrir quelques moutons et de pratiquer le tissage à domicile. C’est ce qui explique d’ailleurs  la naissance d’une nouvelle classe  qui s’enrichissait au détriment des paysans. Ceux ci étaient  plus misérables.  En effet, les forets royales en Angleterre aux années 1500  et même  bien  avant, étaient le symbole des abus  sur les paysans.  Plus  grave, on leurs interdisaient de toucher aux sangliers et aux lièvres, sous peine d’être pendu. Ainsi, ces « fermiers seront chassés de chez eux, souvent dépouillés de tout ce qu’ils possédaient, circonvenus par des tromperies, ou contraints par des actes de violence  » [44]. En réalité nous  aboutissons à la même conclusion car, « ils partent misérablement, hommes, femmes, couples, orphelins, veuves, parents avec des petits enfants.. » Alors pour Raphaël, ces familles s’en vont « loin du foyer familier où ils avaient  leurs habitudes ; et ils ne trouvent aucun endroit où se fixer  » [45]. c’est ainsi par exemple, que « tout  leur mobilier, qui ne vaudrait pas grand-chose…ils le donnent pour presque rien le jour où ils sont obligés de le vendre  » [46]. Lorsqu’ils auront épuisé ce peu d’argent, lors de leur errance, « que peuvent-ils faire d’autre que de voler et d’être pendus ou d’aller en mendiant à l’aventure ?  » [47]. Et dans ce dernier cas, « ils seront rejetés en prison comme vagabonds, parce qu’ils vont et viennent sans rien faire, personne n’acceptant de les payer pour le travail qu’ils offrent de tout leur cœur  » [48]. On peut conclure  avec Raphaël que « l’avidité sans scrupule d’une minorité de citoyens transforme en une calamité ce qui paraissait être l’élément majeur  de la prospérité  » [49] de leur île. La cherté de la vie, amène ces maîtres à congédier leurs domestiques. Que peuvent-ils faire d’autres que de mendier  ou de voler?

    Raphaël peint un autre phénomène du vol. Celui-ci est lié à la misère. Celle-ci se double du goût de la dépense. En effet « chez les valets des nobles, et chez les ouvriers, et presque autant chez les paysans, bref dans toutes les classes », on constante une recherche vers la vie hédoniste. Cette vie avale le peu d’argent qu’ils ont. En effet la logique du marché veut faire des hommes des simples consommateurs qui s’adaptent à tous les produits. Dés  simples purs consommateurs qui n’ont que pour seuls soucis, s’occuper de leurs corps.  L’économie est une vertu des possédants et non des pauvres.  La démarche postmoderne veut faire des hommes  des animaux dont le soucis est de préoccuper du gain, de l’avoir, du produit , du corps, etc. Gourévitch affirme dans ce sens « la vie est brève, et ce n’est pas la peine de la gaspiller à un passe temps aussi creux. Pas besoin non plus de prédications morales, car elles ne font que compliquer la vie » [50]. Le but est de créer  des sujets instinctifs, esthétisants, des êtres soumis à la logique unilatérale du marché. L’homme installé dans la gouvernementalité de soi au sens de Foucault, ne pense qu’à son repli, qu’à son individualité à un corps. C’est avec raison que Nkolo Foe affirme sous le capitalisme en effet, le besoin  de manger cesse de constituer un besoin humain ; plus exactement, il apparaît  comme le seul qui reste à l’homme quand tous les autres besoins ont disparu. (…) Sous la tyrannie des grands complexes agro-alimentaires, manger devient universellement un acte [51]. Il ajoute plus loin «  le capitalisme idéalise le temps court parce que les objets sont essentiellement produits pour l’échange. Fabriqués en série, leur vocation est de générer de profits       élevés » [52]. C’est dans ce sens que Samir Amir a pu dire que «  le capitalisme devient barbarie, invite directement  au génocide. Il est nécessaire  plus  que jamais  de lui  substituer d’autres  logiques de développement, d’une  rationalité supérieure   » [53].

    2. L’utopie comme perfection de l'ordre social

    L’utopie se présente comme une réponse donnée aux maux qui mine une cité. Au centre de cette réflexion, figure en bonne place la morale. Reformer la société, consiste à éduquer les hommes. C’est pourquoi Raphaël envoi un crime d’alarme aux anglais de cette époque. : « Débarrassez- vous de ces maux dont vous périssez  » [54], et « décrétez que ceux qui ont ruiné des fermes ou des villages les rabattissent ou les vendent à des gens décidés à les restaurer et à rebâtir sur le terrain  » [55]. Raphaël plaide pour une reforme de la justice. Comte de Saint-Simon dans De la réorganisation de la société  européenne, affirmait déjà que « l’age d’or du genre humain n’est point derrière nous, il est au-devant, il est dans la perfection de l’ordre social. »

    Dans ce sens, l’utopie n’est pas une rêverie, mais une prise de conscience. Celle-ci se résume autour des deux objectifs : humaniser les individus et responsabiliser tous les acteurs. L’utopie se présente ici comme un principe incompatible avec l’ordre existant quelqu’il soit. Raphaël plaide pour une déhiérarchisation des rapports intersubjectifs : « mettez une limite aux achats en masse des grands et à leur droit d’exercer une sorte de monopole  » [56]. cette égalité sociale implique « qu’il y ait moins de gens qui vivent à ne rien faire  » [57]. Cette politique exige « qu’on revienne au travail de la laine, afin qu’une industrie honnête soit capable d’occuper une masse oisive  » [58].

    Conclusion

    L’objectif de l’utopie de More est de rétablir l’équité sociale. L’utopie se présente comme un essai pour rendre l’homme vertueux et lui permet de reprendre sa véritable nature.  L’utopie de More met en relief le fondement de l’accumulation primitive. Cette accumulation correspond à la période ou la nouvelle bourgeoisie européenne commence à accumuler le capital (argent, or, terre…). A l’époque des économies classiques et comme le dit Adam Smith, le capital est une énigme. L’ont s’interrogeait sur la provenance des richesses. Nombreux sont ceux qui pensaient que le capital est naturel. Dans ce sens, on serait riche parce qu’on serait élu. Karl Marx sera l’un des penseurs à essayer de déchiffrer l’énigme du capital.  Il remet en question la thèse selon laquelle que la richesse découlerai du fait qu’il y aurait certaines personnes qui travaillent plus et d’autres moins. Marx remonte au lieu de préfiguration du capital. En réalité, le problème de l’accumulation primitive, c’est le problème de l’expropriation des nobles sur les pauvres.

    La dépossession des petits paysans, poussent cette catégorie sociale  sans travail, sans argent, et affamée  au vol. L’inflation de la misère  engendre le vol. La justice pénale se montre impitoyable contre cette catégorie sociale : elle punit le voleur et même le vagabond. A l’opposé des cités déréglées et perverties du continent européen, l’Utopie de More se présente comme un lieu d’équilibre et d’égalité. « Dès lors, il n’ya pas en Utopie, de riches et de pauvres ; le désir, l’orgueil et la cupidité ne rongent pas les habitants de l’ile ; la propriété privée et surtout, les signes de richesse et l’argent » [59].

     Nous pouvons donc être d’accord avec Anatole France : « sans les utopistes d’autrefois, les hommes vivraient encore misérables et nus dans les cavernes. […] Des rêves généreux sortent les réalités bienfaisantes. L’utopie est le principe de tout progrès et l’enquisse d’un avenir meilleur. » Au-delà du caractère fictionnel qu’engorge les utopies, il faut dire qu’elle participe à la critique des  sociétés en dessinant un projet d’organisation du monde. En effet en établissant des  nouvelles alternatives de sociabilités d’organisation et de  gouvernances, les utopies se présentent comme la critique du monde tel qu’il fonctionne. En offrant des perspectives nouvelles du vivre ensemble, l’utopie se révèle comme une réalité sans défaut.

    Notes

    1] Thomas More, L’Utopie, Flammarion, Paris, 1987, p.44.

    2] Ibid.

    3] Ibid.

    4] Ibid.

    5] Ibid.

    6] Idem, pp.44-45.

    7] Ibid, p.45.

    8] G. Lipoveski , L’ère du vide, essai sur l’individualisme contemporain , Paris, Gallimard , 1983, p 18.

    9] Thomas More, L’Utopie, idem,  p.45.

    10] Ibid.

    11] Ibid.

    12] Idem, p. 47.

    13] Idem, p.48.

    14] Ibid.

    15] Ibid.

    16] Idem, p.95.

    17] Ibid.

    18] Ibid.

    19] Ibid.

    20] Ibid.

    21] Ibid.

    22] Idem, p.96

    23] Ibid.

    24] Ibid.

    25] Ibid.

    26] Ibid.

    27] Ibid.

    28] Ibid.

    29] Ibid.

    30] Ibid.

    31] Ibid.

    32] Ibid.

    33] Ibid.

    34] Idem, p.97.

    35] Ibid.

    36] Ibid.

    37] Ibid.

    38] Ibid.

    39] Idem, p.99

    40] Ibid.

    41] Ibid.

    42] Idem, p.100.

    43] Ibid.

    44] Ibid.

    45] Idem, pp.100-101

    46] Idem, p.101

    47] Ibid.

    48] Ibid.

    49] Ibid.

    50]   P.Gourévitch  L’humanisme : traditions et paradoxes, Moscou, édition  de l’agence de presse Nanaste . p 55.

    51] Nkolo Foe, Le post-modernisme et le nouvel esprit du capitalisme sur une philosophie globale d’Empire, Dakar, CODESRIA, 2008, p.186

    52] Ibid.

    53] Samir Amin , cité par  Nkoloe  Foe , le postmodernisme et le  nouvel esprit  du capitalisme, p , 18

    54] Thomas  More, L’Utopie, idem, p.103.

    55] Ibid.

    56] Ibid.

    57] Ibid.

    58] Ibid.

    59] Idem, p.42.

     



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