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Mitanalisi dell'insularità / A cura di Orazio Maria Valastro - Hervé Fischer / Vol.17 N.1 2019

Les marques sont des îles

Georges Lewi

lewi.georges@gmail.com

Mythologue, spécialiste des marques, consultant, conférencier, écrivain (www.lewi-georges.com, www.mythologicorp.com).


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Bianca Impallomeni - L'insularità attraverso le immagini - Liceo Artistico Statale Emilio Greco, Catania - Quarta edizione Thrinakìa, premio internazionale di scritture autobiografiche, biografiche e poetiche, dedicate alla Sicilia

Insularité, distance, différence, différentiation, îles et marques affirment une essence de distinctivité. Celle-ci n’est-elle pas une façon de rechercher, à travers la distinction, une fois de plus, une impossible immortalité comme le montre le rôle des îles dans les mythologies ? Les deux ont ainsi poussé au paroxysme tous les ingrédients du storytelling, cet art du récit qui permet aux êtres humains de se situer, de trouver leur place dans un monde perçu comme de plus en plus complexe. Avec les autres et cependant si différent.

 

La marque commerciale, on non commerciale, (celle des ONG par exemple) est ainsi définie juridiquement : « Au sens de la propriété industrielle, la marque est un « signe » permettant de distinguer précisément les produits ou prestations de services d'une entreprise de ceux de ses concurrents. Le signe peut être un mot, un nom, un slogan, un logo, un dessin, etc. ou la combinaison de ces différents éléments »[1]. En déposant juridiquement sa marque, le déposant obtient par un monopole d'exploitation sur 10 ans, renouvelable indéfiniment, le droit d’affirmer une distinction fondamentale. Il est le seul à pouvoir utiliser cette marque et peut la défendre en poursuivant en justice toute personne physique ou morale qui voudrait se l’accaparer, la copier ou simplement s’en inspirer. Ce que recherche donc une organisation, une entreprise, quand elle crée et développe une marque est son caractère distinctif, ce qui va la différencier, l’isoler des produits communs et des autres marques de sa catégorie.

 

Les îles affirment avec la même force leur différence et leur distinction. Voici, par exemple, ce qu’on peut lire sur un document touristique de la « grande île » : « Madagascar est une île précieuse et sacrée qui se distingue des autres nations ». L’île de la Réunion, sa voisine en océan indien surenchérit en singularité régionale : « L'île de la Réunion n'a pas le même relief que ses voisines de l'archipel des Mascareignes. N'imaginez pas ici une île entièrement bordée de plages paradisiaques comme aux Seychelles, mais plutôt une terre montagneuse et volcanique où il fait bon randonner. L'île de la Réunion, une île à la géographie unique…un endroit qui ne vous laissera pas indifférent… ».

 

Apple, la marque des marques, l’inventeur de la marque contemporaine, a pour slogan depuis l’origine (la marque n’en n’a jamais changé !) « Think different », expression de la singularité, de l’insularité de la marque et de son client. Avoir un produit Apple est l’affirmation de ne pas être comme tout le monde, même si un milliard d’individus prétendent à cette individualité. Telle une île paradisiaque, un Iphone, nous dit, en substance la marque à la pomme, ne vous laissera jamais dans l’indifférence.

 

L’île et la marque ont en commun d’affirmer leur singularité irréconciliable avec le reste des créations. Insulaire est synonyme d’inabordable, de non miscible, d’incompréhensible, voire d’étrange ou d’étranger au reste de l’humanité. Une île est toujours un lieu difficile à atteindre comme nous le rappelle la tradition homérique de l’île d’Ithaque, royaume d’Ulysse, héros de la guerre de Troie (c’est lui qui invente le cheval qui permettra à la Grèce de gagner la guerre). Indissociable de l’œuvre d’Homère, Ithaque, dissimulée au creux de l'archipel des îles ioniennes, évoque l’errance périlleuse d’Ulysse pour retrouver sa pacifique singularité après s’être battu durement. Après neuf ans de guerre et dix autres années à affronter les obstacles placés sur son chemin par Apollon qui ne l’aime pas, Ulysse regagne finalement son île singulière et sa si fidèle épouse.

 

Il n’est jamais facile d’atteindre une île, un lieu, « perdu au milieu de la mer » qui cultive naturellement l’inaccessible. Il n’est jamais facile de s’offrir les produits d’une marque de luxe, en particulier. Les prix sont chers, les boutiques sont peu nombreuses, et il faut en connaître les codes pour y être bien accueillis. Mon amour des îles m’a sans doute conduit à celui des marques dont chacune d’elle est une façon singulière de « faire île à part ».

 

Devenir une marque pour un produit ou un service est aussi complexe et semé d’embuches que le voyage d’Ulysse pour atteindre son île chérie. La plupart des produits qui sont lancés ne deviendront jamais des marques malgré les investissements publicitaires. Car un produit n’est qu’un « bout de terre », un prolongement du continent marketing des catégories existantes. Les produits les plus originaux sont au mieux des archipels, des bandes de terre un peu plus étroites. A l’inverse, une marque comme une île est toujours une rupture. C’est un espace sans continuité avec le continent des produits concurrents.

 

Iphone a été conçu en rejetant toutes les idées préconçues et toutes les contraintes de miniaturisation. Google ou Wikipedia ont relancé le mythe du savoir universel. Gabrielle Chanel ou Yves Saint Laurent ont cassé les codes du rôle de la femme en société. Moulinex ou Seb ont introduit des ruptures impensables en dix mille ans dans la cuisine… Amazon se présente comme la réincarnation du paradis terrestre où tout se trouve immédiatement à portée de click. Espace de Renault s’est imposé comme une marque, alors que les noms des autres modèles de la marque sont oubliés car Renault a osé faire d’un « véhicule utilitaire » un espace pour embarquer et déplacer sa famille. Toutes les études avaient prédit un échec cuisant. Ce fut une réussite. La rupture de l’île ou de la marque attire comme la part d’ombre ou de risque inscrite en chaque être humain.

 

La marque est donc, avec ses consommateurs, une rencontre à la fois désirée et paradoxalement contre-nature, comme le fut celle de Robinson Crusoé et de son île. Involontaire et inclassable, voire inamicale. L’île et la marque développent des attachements et des fidélités non envisageables préalablement. L’île et la marque sont des impensés, des réalités conceptuelles qui s’imposent à nous, sans préparation. Elles se distinguent en nous distinguant. Nul ne veut se séparer du continent de l’humanité et nul ne veut être comme tout le monde. Chacun se pense et se sent singulier. Les marques et les îles les plus appréciées sont celles qui ont su ne pas être trop éloignées du continent le plus proche. Elles nécessitent des efforts pour les atteindre mais elles n’encouragent pas la séparation irrémédiable.

 

« L’homme est un tout fragile et unique », disait déjà Montaigne. Les marques cultivent le besoin de particularisme de chacun des êtres humains. A défaut d’immortalité, au moins laisser une trace ! Les insulaires affirment pour la plupart, leur origine et leur originalité. A commencer par les Grands Bretons. Les marques (de vêtements, de chaussures en particulier) offrent aux consommateurs de ne pas être tout à fait comme le voisin de palier ou la voisine du club de sport. L’une sera Converse et l’autre New balance. L’un Nike (la victoire à tout prix, le monsieur muscles) et l’autre Asics (Anima Sana In Corpore Sano, l’intello). L’un Eram, l’autre André. Les marques se distinguent les unes des autres comme les îles. L’ile de Ré, île bien française a peu de points communs avec la Guadeloupe, autre île bien française. Qui a-t-il, en effet de commun, entre ces marques de fromages nées en France Président et Bel ? Toutes deux sont connues et reconnues et cependant tout les oppose autant que les Kerguelen et La Réunion…

 

Il y a à l’île de Ré, à la Guadeloupe, à La Réunion des gens et des cultures réellement distinctes même si la nation française les considère comme juridiquement semblables. Chaque population est attachée à son île comme elle l’est à ses marques. Car la fidélité, souvent définie comme une vertu,  peut aussi devenir maladive. Les îles et les marques font tout ce qui est leur pouvoir pour fidéliser leurs habitants ou leurs consommateurs. Une île inhabitée conserve son pouvoir légendaire mais perd son pouvoir  d’attraction. Une marque sans clients devient une chimère. Or la fidélité tant recherchée dans les deux cas est difficile à obtenir. Un consommateur satisfait n’est pas nécessairement fidèle. Un îlien heureux pourra quitter son île comme si le bonheur portait, en lui, un risque paradoxal de détachement.

 

Les îles comme les marques trop accessibles ont moins d’attrait. Le mass market des hypermarchés a renforcé la notoriété et la présence des marques et les a affaiblies en même temps. Trop accessibles, elles deviennent des lieux communs. Avec le tunnel sous la Manche, la Grande Bretagne devenue accessible par le TGV s’est sans doute sentie trahie et a voté le brexit comme pour réaffirmer son insularité.

 

Les comparaisons et les métaphores sont multiples entre îles et marques. Les marques empruntent souvent aux îles leur récit et leur imaginaire. Le parfum Fidji crée par Guy Laroche développe sa publicité autour de l’image de l’île vierge. Le slogan de Fidji est : « La femme est une île, Fidji est son parfum ». Le visuel met en scène une femme nue, accroupie sur le sable d'une plage, berçant un grand flacon Fidji. Le retour au paradis perdu, à l’âge d’or dont Jean Jacques Rousseau situait, naturellement, l’origine sur une île. Une autre marque, celle des opticiens Atol montrait un ancien chanteur abandonné sur une île, tel Robinson Crusoé, cherchant, grâce à ses lunettes des signes de bateau au loin. Pour leurs publicités les opticiens Atol ont longtemps utilisé le chanteur Antoine, marin aguerri, comme égérie.

 

Paradoxe, la plupart des îles sont devenues des marques. Le marketing a fini par apprivoiser l’insularité et la réduire en marques. Tetiaora, L’ile privée de Marlon Brando se nomme désormais « the Brando » et la chambre se loue à la semaine. Pour une chambre 4000$ ! Même Ithaque fait désormais sa publicité en surfant sur le mythe d’Ulysse. « De nombreux sites sur Ithaque évoquent l'Odyssée d'Homère. Une jolie marche vous conduira vers la grotte des nymphes. C'est dans la baie de Deka qu'Ulysse fut déposé endormi. La source d'Arethousa, au Sud est accessible en deux heures de marche environ…On suppose que le palais d'Ulysse était situé dans les environs de Stavros », peut-on lire sur la présentation touristique.

 

Les îles deviennent des marques touristiques, nouvel eldorado commercial de la singularité. Les îles et les marques étaient faites pour se rencontrer autour du concept de rareté, et par conséquent du prix à payer pour avoir le privilège de les atteindre. La singularité du phénomène insulaire conduit au rêve d’immortalité, la distinction suprême, celle des dieux de l’Olympe.

 

Les produits meurent et sont remplacées par d’autres. Les marques s’affirment immortelles comme les îles. Les grandes marques de luxe ont 150, 200 ans, plus… On ne voit pas leur fin s’annoncer. Immortelles ou se considérant comme telles, marques et îles développent des guerres de position, des guerres d’idées qui se font face et qui expriment, au travers de leurs récits, des situations a priori irréconciliables. Chaque île développe son mythe pour s’inscrire dans le grand récit de l’humaine condition, chaque marque aussi.

 

Le biologiste Henri Laborit dans le film d’Alain Resnais « Mon oncle d’Amérique », narre un des plus beaux récits contemporains sur l’imaginaire de l’île, sur les motivations humaines, le rôle de la mémoire et des mythes qui nous structurent. Le biologiste y affirme que le but ultime de la vie est la vie. Survivre coûte que coûte serait notre plus profond destin. Voilà pourquoi les super-héros qui se sacrifient pour les autres nous fascinent tant. Ils sont totalement a-normaux.

 

L’être humain se sait mortel. De cette tension insupportable nait notre condition humaine et les artefacts que nous allons nous fabriquer en petits bricoleurs pour survivre ou avoir le sentiment d’essayer d’y parvenir. Laisser une trace, se différencier des autres ! Provoquer le souvenir de soi au-delà de la mort. Vivre en son île et en ses marques. Devenir soi-même une marque, peut-être même une île…

 

Depuis toujours, l’être humain, « sapiens », va essayer de contourner cette difficulté d’être, de vouloir durer et de se savoir mortel. Il va chercher l’éternité qu’il sait impossible. Mais sait-on jamais ? Du moins, peut-on essayer de repousser les limites du temps et de se croire -presque- l’équivalent d’un dieu, c’est-à-dire de retrouver, même pour un moment, un brin d’immortalité. Les îles et les marques sont immortelles. Elles étaient là avant nous et serons là après. Comment capter une étincelle de leur éternité ? Seuls les dieux de la mythologie sont immortels. Les îles et les marques seraient-elles divines, le prolongement humain des dernières divinités ?

 

La mythologie grecque avait bien compris cette tension et avait défini 3 catégories d’êtres : les dieux et déesses immortels, les demi-dieux (fille ou fils d’un dieu le plus souvent et d’une mortelle) également immortels et les humains complètement et irrémédiablement mortels. Même les héros de Troie protégés par une divinité étaient motels ! Achille a failli survivre à la guerre mais son talon n’avait pas été protégé et c’est là qu’une flèche ennemie le toucha lors de l’assaut final contre la cité d’Asie mineure.

 

Les îles et les marques sont des refuges contre la mort, des espoirs de vivre au-delà des autres, des boussoles et des ports où la vie restera possible (et peut-être même paisible) même lorsque tout sera détruit. Des espaces physiques, numériques et mentaux pour survivre. Les humains, face aux risques de destruction de l’espèce, ont au travers des mythologies, « inventé l’espoir », elpis en grec, une déesse ambigüe qui exprime la possibilité d’attente face à nos impatiences. Elle est dépeinte comme une jeune femme portant généralement des fleurs ou une corne d'abondance dans ses mains. C’est ce qui reste à l’être humain quand tout est perdu ou quand tout lui semble sans avenir. L’espoir est ce qui sépare sans doute l’humanité de l’animalité. C’est à la fois un bonheur extrême qui nous sauve de situations impossibles mais aussi un malheur car il entretien l’illusion de notre impossible immortalité. Les êtres humains ont souvent oublié que l’île n’est souvent qu’une fille détachée du continent et que la marque n’est que la fille capricieuse du marketing. Mais qu’importe ! Le symbole de la différence suffit à leur rendre leur  virginité.

 

Comment faire lorsqu’on s’aperçoit que l’immortalité n’est qu’un leurre et que désormais le blues, la mélancolie nous atteint ? Jadis, l’être humain appelait au secours les divinités qui l’aidaient pour chaque difficulté et le rapprochaient un peu de l’Olympe dont elles étaient issues. Un petit « zest d’Aphrodite pour rester la plus belle » ? Déesse de la beauté et de l’amour, elle avait à Corinthe son lieu de culte où, paraît-il, jusqu’à un millier de prostituées sacrées grouillaient dans son temple, un des plus riches du monde antique. Car tout se tarifait… déjà. Comme au temps des marques.

 

Avec le Dieu unique, l’espoir s’est déplacé hors du temps humain. Mais les questions du « hic et nunc » demeurent. Les problèmes de vieillissement, de l’amour non partagé, sont bien présents. Comment séduire, comment rester la plus belle, comment le retenir ou la garder pour soi ? Les îles servent encore de consolation, aux plus rugueux comme aux plus riches. Elles sont des machines à oublier la société. Leur nom fait toujours rêver : Les Marquises, les Moluques, Java… Mais l’être humain qui reste un animal social invente aussi les marques, ces îles qu’on trouve dans le commerce, ces nouvelles singularités du quotidien. L’Oréal ou Lancôme, Yves Rocher… promettent la séduction. Pour quelques dollars seulement ! L’espoir fait alors le reste du « job ». Les marques sont notre bâton de pèlerin, notre refuge en cas de tempête, celui qui nous assure de pouvoir aller jusqu’au bout de nous-mêmes. Car les îles et les marques nous révèlent à nous-mêmes plus qu’elles ne se révèlent à nous.

 

Avec Ferrari, vous chevauchez le plus beau et le plus fougueux des « pur-sang ». Avec Mercedes, en pilotant, vous touchez à l’étoile divine. Avec Range Rover, vous retrouvez la puissance du bucheron qui sommeille en vous… Naïf ! Certes. Mais plein d’espoir ! Cela suffit. A défaut de résoudre nos problèmes existentiels l’achat d’un produit de marque et le séjour dans une île nous consolent un peu. Elles nous aident à bricoler notre vie du mieux possible. Plus la marque se montre mystérieuse, ritualisée, plus le mythe sera fort car toute divinité sait cultiver son mystère.

 

Le storytelling, qui nous vient de la tragédie grecque avant d’avoir séduit les scénaristes du cinéma nous montre un monde divisé en deux. La bonne partie, celle du héros qui se bat contre une horde de méchants. Il y a peu de nuances dans ce type de narration. Comme il y a peu de doutes dans le récit d’une marque. La jeune femme sera Yves Rocher (le mythe de la nature toute puissante) ou L’Oréal (le mythe de la science plus forte que la nature), le consommateur sera Coca-Cola (le monde « acceptable » des good boys), Red Bull (le monde de l’extrême et des bad boys) ou ne boira définitivement que de l’eau. Chaque marque est une île qui affirme et cultive son climat, sa végétation, sa spécificité.

 

Il appartient ensuite à la marque ou à l’île de donner des preuves de la véracité du récit. Car tout est affaire à la fois de pertinence et de cohérence. Que serait la vérité d’Apollon sans sa Pythie interpellant par oracle interposé même le très sage Socrate ? Que serait Mac Donald et son mythe du « manger libre et barbare » sans son indigeste big Mac dégoulinant de sauce et de concombres entre nos mains graisseuses ? La Corse est définitivement l’île du maquis dans lequel les crimes peuvent rester impunis. L’île de Ré, celle de l’entre-soi des bourgeois Bobo parisiens qui ont transformé l’île en presqu’île en construisant un pont avec le continent. Chacune travaille le récit de l’imaginaire qu’elle propose pour en faire un argument touristique ou immobilier. Vivre sur l’île Saint Louis à Paris coûte 15 000 euros au mètre carré. Et toute la région se fait appeler, par extension, « Île de France ».

 

On n’échappe ni aux îles, ni aux marques car il nous faudrait renoncer à notre humanité et à notre égo d’être différent, d’être un peu à part, à notre part de distinction. Ce qui nous semble impossible, du domaine de l’inhumain.

 

Notes

 

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