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  • Le mythe de la maîtrise du risque dans les sociétés modernes
    Jawad Mejjad (a cura di)

    M@gm@ vol.13 n.2 Maggio-Agosto 2015





    ÉDITORIAL

    Jawad Mejjad

    jawad.mejjad@orange.fr
    Docteur en sociologie, chercheur au CEAQ - La SORBONNE, et chef d’entreprise (dans le secteur de l’électronique) après avoir eu une longue expérience dans l’entreprise. Enseignant au CNAM (Conservatoire National des Arts et Métiers) dans le master Marketing-Vente, anime des cycles de formation pour de grands groupes ou des associations professionnelles. Ses réflexions et recherches, plus généralement, portent sur les valeurs et les structures d’organisation de l’entreprise à l’aune de la postmodernité. En 2010, il a publié « Le rire dans l’entreprise » L’Harmattan.

    C’est avec une grande fierté que j’ai le plaisir de présenter ce numéro spécial de M@GM@, qui se veut une réflexion autour de la notion de risque dans nos sociétés modernes. C’est à l’invitation d’Orazio Maria Valastro que j’ai proposé ce sujet qui me semble porter en creux les questionnements essentiels des mutations sociales en cours.

    S’il y a un qualificatif qui caractériserait au mieux l’époque actuelle en Occident, ce serait la frilosité. En effet, il y a une sclérose généralisée, qui se traduit par un ressenti de crise. Or qui dit frilosité, sclérose, crise, dit assurer ses arrières et surtout ne pas prendre de risque, ou alors des risques calculés ou du moins mesurés, ce qui constitue une attitude poule moins oxymoritique. Notre société ne tolère plus le moindre incident, et tout accident ou aléa est vécu dramatiquement, que ce soit un accident d'avion, une panne informatique ou même un tsunami. Nous voulons tout maîtriser, et il nous est insupportable que les choses ne se passent pas comme nous l’avons prévu. Exit le destin, le fatum, la volonté des dieux, la Providence… La rationalisation du monde a entrainé dans son sillage un désenchantement, comme l’a montré M. Weber. Autrement dit un rejet de la magie comme structure sociale, et comme moyen d’apprivoiser le hasard et les coups du sort.

    Gérer les risques, c’est rendre le danger prévisible et calculable. Dès lors c’est à une société assurantielle qu’aura abouti la modernité, pour prémunir l’entrepreneur schumpetérien, figure emblématique du capitalisme. La prise en charge du risque par la société s’inscrit dans le génome et dans l’esprit du capitalisme, comme l’a montré U. Beck qui a parlé à juste titre de « société du risque ». Or à vouloir tout maîtriser, nous nous retrouvons à refuser le réel tel qu'il est pour lui substituer une représentation du monde tel qu'il doit être. Et à trop vouloir maitriser le risque, nous aboutissons à une société du contrôle, et nous ne savons plus comment réagir face à cet élément fondateur de notre inconscient social. Dès lors notre attitude face au risque est ambivalente : prendre un risque fait-il de nous des irresponsables ou alors des aventuriers curieux ?  et ne pas prendre de risque équivaut-il à la prudence ou à la pusillanimité ? Le discours politique tangue entre « le risque 0 n’existe pas » et « le principe de prudence ». Or la vie dépasse toujours la forme dans laquelle nous voulons l’enfermer (cf. Simmel), et la modernité n’a cessé de rencontrer des limites à sa prétention de la maîtrise des risques.

    Les auteurs réunis ici ont chacun dans son champ de recherche, montré la pertinence du risque dans la compréhension de notre société.  La maitrise du risque est au fondement de la modernité, comme ne manquent pas de le rappeler  beaucoup de nos auteurs. Or ce qui caractérise notre quotidien est une inquiétude latente, un sentiment d’incertitude diffus : nous ne nous sentons plus maîtres de notre destin. Ce numéro a l’avantage de présenter d’une part une réflexion historico-sociétale et anthropologique de la notion du risque, et d’autre part une analyse de cette notion dans divers champs et situations. Ainsi M.Maffesoli synthétise ici une réflexion entamée dès les années 80, pour insister sur la nécessaire incorporation du mal en général et du risque en particulier, et y voit l’expression du vitalisme postmoderne ;  D. Le Breton, dont les travaux ont notamment éclairé les comportements à risque des adolescents, présente ici une analyse de notre représentation du risque et pointe notre ambivalence face à celui-ci ; A.Martin analyse le risque à l’aune de la cybernétique, en rapprochant les thèmes de N.Wiener de ceux de U.Beck ; R.Nifle présente une réflexion sur le sens de l’expérience du risque à travers une carte des Sens et des Cohérences du risque, et éclaire ainsi l’approche du risque par notre société en crise.

    Cette notion de risque a aussi été analysée en situation. Ainsi R.Badouin et F.Esposito ont scruté le mythe du risque zéro sécuritaire et le risque du terrorisme, à travers la figure du « loup solitaire » ; S.Hugon et J.Mejjad ont cherché à comprendre l’évolution du risque entrepreneurial vers une intégration du ludique, en réalisant une archéologie des fondements mythologiques et historiques de l’entreprise ; J.Lacoste a choisi de montrer comment la notion du risque a évolué dans la pratique du catch, et comment la tentation de réduction de l’incertitude finit par faire perdre sa magie à ce sport devenu spectacle ; Mansalier, pour rester dans le sport, analyse comment l’expression de la douleur chez les adolescents lors de la course à pied,  est une construction de l’identité ; Jeudon mobilise le concept de parergon de Derrida pour questionner nos limites, à travers la figure du funambule ; O. Amarie a établi, par une étude qualitative, une cartographie des risques d’aller étudier à l’étranger ; V.Richard et C.Pouliot  présentent le processus d’appropriation de la notion du risque par les citoyens pour ne pas la laisser au seul apanage des scientifiques, à travers l’analyse précise d’une controverse environnementale à Québec.



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